JANOT CHERCHEUR D’IMAGE
JANOT CHERCHEUR D’IMAGE
A la fin du siècle dernier en même temps que les chercheurs d’or partaient autour du monde, de curieux hommes chargés de grosses boites en bois, nommées chambres noires recherchaient les pépites visuelles dans les contrées les plus reculées, les plus inconnues, les plus éloignées de la lumière des métropoles. Cette rareté du cliché saisi dans l’argent, brûlait les yeux de ces photographes comme on les nomma, pendant que les premiers omnubilés par leur métal précieux convoitaient la richesse brillante de l’or.
Guillaume Janot fait penser à ces pionniers du bout du monde, lui aussi arpente les territoires lointains à la recherche d’images. Mais la différence est qu’il arrive après le déferlement de communication du vingtième siècle avec son cortège infini de photographies sur papier glacé ou d’images animées sur des écrans télévisuels et cinématographiques. Chacune d’elles impliquant qu’elle transporte déjà en elle-même d’autres images archétypiques, compagnons d’imaginaire qui ont nourri et nourrissent les hommes.
Et Janot s’affronte vaillamment à cette quête de l’image générique, originelle, porteuse ou non de référents symboliques et historiques, bien conscient de cette presque impossibilité, parce que chaque image délivre à sa surface ces signes qui la contextualisent dans son époque, son esthétique et son histoire. Car dans son cas on comprend que cette approche spécifique à vocation style documentaire, est à ses yeux consubstantielle à celle de la notion d’auteur; là où la vision subjective s’allie à la conscience politique dans une incarnation à la fois poétique et analytique. Une grande majorité d’artistes contemporains craignent cette incarnation de l’art dans l’histoire, se réfugiant dans des formes abstraites, sèches et vides qui ne renvoient qu’à leurs représentations propres, uniquement supportées par un discours conceptuel. Guillaume Janot échappe à ce piège, continuant son périple dans les codes de l’image, qu’il croise au gré de ses voyages. Il ne s’arrête jamais uniquement à des thématiques d’ordre directement sociologiques ou historiciennes. C’est une double lecture permanente, parfois cette fausse innocence des photographies, de prime abord, qui le fascine; mais est-elle encore possible, encore plus pour lui surtout qui n’est pas dupe des signifiés de ses images?
Et quand il constitue ultérieurement son éditing, il compose tel un musicien son oeuvre artefact, élaborant et réinventant les articulations déjà présentes, spontanément au moment de la prise de vue, recroisant ses préoccupations antérieures intuitives. Ainsi chacune de ses photographies délivrent- elles son secret qui renvoie à d’autres secrets et à d’autres photographies que le voyageur extérieur interprétera différemment selon sa vision propre.
Gilles Verneret